Les joueurs de rugby de plus en plus lourds et grands
SCIENCE - C'est une étude scientifique qui le dit...
A l'image du 2e ligne du XV de France Pascal Papé -115 kg, 1,96 m-, les joueurs de rugby deviennent de plus en plus lourds et grands, des critères physiques, qui, avec le vécu collectif, sont déterminants pour arracher la victoire, montre une étude française. L'équipe du Pr Jean-François Toussaint (Institut de Recherche bioMédicale et d'Epidémiologie du Sport, Irmes, Paris) a analysé les caractéristiques physiques de tous les joueurs retenus pour participer aux matches de Coupe du monde, depuis la première en 1987, en Nouvelle-Zélande et en Australie, jusqu'à l'édition 2007 en France. Soit 2.692 joueurs, 1.457 avants (numéros 1 à 8) et 1.235 arrières (9 à 15).
L'étude, publiée mardi en ligne par la revue spécialisée British Journal of Sports Medicine, montre que le poids des joueurs a augmenté progressivement en 20 ans de plus de 6,6 kilos (6,63 kg pour les avants et 6,68 kg pour les arrières). La taille des avants s'est accrue de 0,61 cm et celle des arrières de 1,09 cm. Elle montre également, pour toutes les Coupes du monde, que les avants des équipes parvenues en finale, demi-finales et quarts de finale étaient «significativement plus lourds» que les avants des autres équipes.
En moyenne, les joueurs des équipes les plus performantes pesaient quelque 2 kg de plus que ceux des équipes moins efficaces. De même, les arrières des meilleures équipes avaient environ 2 cm supplémentaires. L'augmentation de la masse des joueurs a accompagné la professionnalisation du rugby, avec notamment des séances de musculation plus intenses et un suivi nutritionnel, notent les chercheurs.
Davantage de confrontations physiques
«Les joueurs deviennent de plus en plus lourds et de plus en plus grands. Malgré les aspects complexes de la performance, des critères simples comme le poids et la taille restent déterminants et discriminants sur la performance en Coupe du monde», analyse Adrien Sedeaud, chercheur à l'Irmes. «Mais ce ne sont que deux déterminants parmi tant d'autres, à eux seul ils ne peuvent faire gagner un match», ajoute-t-il.
Les chercheurs se sont également intéressés à l'«expérience collective» -l'habitude de jouer ensemble- des joueurs engagés dans les matches de Coupe du monde. Ils ont montré que les équipes gagnantes avaient une plus grande expérience collective - estimée à partir du pourcentage de joueurs ayant déjà joué précédemment en Coupe du monde. Ce pourcentage atteignait près de 40% pour les équipes victorieuses, contre à peine 32% pour les autres.
Pour Adrien Sedeaud, l'habitude de jouer ensemble est «essentielle, notamment pour le paquet d'avant. Le partage de l'effort est crucial dans toutes les actions: le déblayage dans le ruck, la synchronisation durant les touches ou encore le placement et les orientations collectives pendant les mauls et mêlées». «Il faut déblayer sur les zones de plaquage le plus rapidement et proprement possible, et le fait de faire ça avec des partenaires qu'on côtoie depuis longtemps, permet de créer des automatismes», indique-t-il.
Le chercheur souligne que le nombre de plaquages, de rucks, de confrontations physiques, a notablement augmenté dans le rugby moderne (passant de 62,4 rucks par match durant le tournoi des Six Nations en 1988 à 134,4 en 2002). «C'est pour ça aussi qu'on va chercher les joueurs les plus lourds et les plus forts», explique-t-il. «Les règles peuvent changer le jeu et donc changer les corps, mais les corps aussi inversement peuvent avoir une influence sur le jeu», conclut-il.
http://www.20minutes.fr/article/883797/joueurs-rugby-plus-plus-lourds-grands