Le rugby pro a 20 ans.....SO du 13/08/15

Le rugby pro a 20 ans : qu'est-ce qui a changé ?

Plus vite, plus haut, plus fort : avec l'arrivée du professionnalisme, le rugby est entré dans une nouvelle dimension. Retour sur 20 ans d'évolution
Temps de jeu, effectif en hausse, explosion des gabarits de joueurs de plus en plus polyvalents, réduction des espaces : le rugby, longtemps réputé conservateur, a profondément évolué depuis l'arrivée du professionnalisme il y a 20 ans.
Un sport devenu spectacle
L'amateur qui aurait vécu en ermite ces deux dernières décennies aurait bien du mal à reconnaître aujourd'hui son rugby, devenu un spectacle mondialisé. Pour rendre le jeu plus attractif, les règles ont évolué, réduisant le nombre de touches et de mêlées. Résultat: un temps de jeu effectif doublé, autour des 40 minutes.
Exemple de modification des règles: l'autorisation du "lifting" en touche, soit la possibilité pour le sauteur d'être porté par un coéquipier. "Avant, deux touches sur trois étaient arrêtées (par l'arbitre) ou injouables. Aujourd'hui ce secteur est devenu une vraie rampe de lancement", souligne Pierre Berbizier, ancien international et sélectionneur français.

Le "lifting" est devenu une vraie rampe, selon Pierre Berbizier© Photo Bats pascal
Des joueurs de plus en plus physiques
"La prédominance du physique amène quelquefois les joueurs à jouer comme des cons"
Ce spectacle est joué par des acteurs devenus professionnels. L'entraînement est quotidien et la musculation a pris une place prépondérante, faisant exploser le gabarit moyen de joueurs plus robustes et se déplaçant plus vite, plus longtemps. En 20 ans, un trois-quarts de l'équipe de France a pris en moyenne 13 kg de muscles.

La musculation a pris une place prépondérante dans le rugby© Photo AFP FRANCK FIFE
Le rugby évolue inexorablement vers le "tout physique", sur le modèle des nations de l'hémisphère Sud, explique Philippe Saint-André. Et des gabarits à la Lomu deviennent presque banals.
Le spectre du dopage est brandi par certains suiveurs ou anciens joueurs. "La prédominance du physique amène quelquefois les joueurs à jouer comme des cons. Il faut suivre l'évolution et rentrer dans un jeu qui plaît au public, aux médias", regrette Pierre Villepreux, lui aussi ancien international.

Les gabarits à la Lomu deviennent presque banals© Photo AFP
Des joueurs plus poylvalents
Cette prépondérance du physique a, d'après Berbizier, "donné encore plus de place à la polyvalence". Fini un Jean-Pierre Garuet qui trottinait d'une mêlée à l'autre. "Désormais, on demande à un première ligne de courir comme un troisième ligne, et à un trois-quarts de défendre comme un troisième ligne", développe l'ancien demi-de-mêlée.
Une évolution particulièrement visible dans le cinq de devant, dont les deuxièmes ligne, qui ne se contentent plus de sauter en touche et batailler dans les regroupements, mais sont aussi amenés à toucher beaucoup de ballons.

Le prototype moderne est le All Black Brodie Retallick, qui "pourrait jouer centre" selon Berbizier.
Moins d'essais
Cette polyvalence a aussi entraîné une réduction des espaces, puisque tous les joueurs se déplacent et se replacent en défense pendant 80 minutes ou presque. Autre conséquence du professionnalisme, l'utilisation systématique de la vidéo, qui fait que "tout le monde se connaît, tout est disséqué", souligne Berbizier.
Avec comme résultat la multiplication des temps de jeu et la prise du milieu de terrain pour déstabiliser à l'usure des défenses resserrées. Et comme conséquence une baisse du nombre d'essais sur les premiers temps de jeu. Plus spectaculaire, le rugby est aussi devenu plus stéréotypé.