La chronique de P. Villepreux (à méditer)

La chronique de P. Villepreux
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La chronique précédentePierre Villepreux revient sur un championnat assez pauvre en intentions, où l'enjeu et la peur de la défaite priment sur le jeu.

Le top 14, pour la reprise n'a pas répondu en termes de qualité de jeu à l'attente que le championnat d'Europe avait fait espérer. Le jeu restrictif constaté est la conséquence des effets négatifs qui ne manquent pas de s'installer quand la peur de perdre est grandissante. Pour créer une dynamique favorable à la réalisation d'un jeu ambitieux, il conviendrait que le jeu gagnant soit bien celui des équipes qui entreprendraient le plus. Ceci implique qu'il y ait chez tous une réelle volonté de tenter de développer un volume de jeu sinon démesuré du moins suffisamment significatif. La mise en oeuvre de ce rugby par le plus grand nombre, se révélant efficace, (puisque gagnant), réduirait dans le temps les effets très pervers qu'engendrent me semble-t'il aujourd'hui, la peur du résultat.

La défaite semble engendrer une véritable angoisse, elle entretient malheureusement, voire développe pour le joueur la peur de l'échec personnel créant une forme de culpabilisation face aux jugements quels que soient leur origine. Ceci est d'autant plus vrai dans le système professionnel où les intérêts financiers et d'image prennent une importance non négligeable.

Il devient alors difficile même si l'entraineur est favorable à la mise en oeuvre d'un jeu plus osé que les joueurs s'engagent résolument dans un rugby porteur d'autres ambitions tactiques et d'autres savoir-faire, rugby dont ils ont une vision menaçante, puisque les moindres erreurs surtout en cas de mauvais résultats peuvent entrainer des conséquences qui ne prédisposent pas à évoluer. Le joueur n'est plus alors mentalement à même d'utiliser tout son potentiel.

Il faudrait pour sortir de ce carcan que chaque week-end les équipes gagnantes soient celles ayant développé le plus de jeu. Porteuses d'un projet de jeu résolument ambitieux, le rugby choisi finirait par s'imposer et en fin de compte deviendrait une référence nationale avec bien sûr en figure de proue les différentes équipes nationales.

L'analyse qui est faite généralement des matchs, ceux qui sont perdus voire même gagnés petitement sont significatifs. Les raisons invoquées le plus souvent posent le problème d'un changement de l'habitude professionnelle que les entraineurs devraient adopter s'ils souhaitent vraiment modifier les comportements individuels et collectifs. L'acquisition par les joueurs d'autres pouvoirs et capacités tactiques pour qu'ils deviennent dans la durée, stables donc répétitifs quels que soient les enjeux passe par l'acceptation de l'erreur. Il ne s'agit pas de la valoriser mais bien de la mettre en lumière et de s'en servir pour faire émerger les difficultés. Il s'agira donc dans l'entraînement de créer les conditions et situations qui placent les joueurs à la fois en situation de réussite et d'échec. Les erreurs rencontrées sont alors replacées au centre de la progression du joueur et du collectif et non plus perçue négativement comme quelque chose de faux qu'il conviendra d'éliminer le plus vite possible dans la compétition.

Considérer les erreurs tactiques et techniques non pas comme des fautes mais bien comme des obstacles nécessite de proposer des contenus de travail qui prennent en compte la réalité de l'activité rugby, l'opposition 15 contre 15 afin de créer toutes les contraintes et les conditions de la compétition.

Il ne me semble pas, pour des raisons qui m'échappent, que l'on soit aujourd'hui complètement dans cette dynamique de travail. Elle est pourtant déterminante si l'on veut cerner les difficultés réelles rencontrées au plus haut niveau national et international pour développer un autre style de jeu avec d'autres ambitions et créer d'autres types de joueurs capables de comprendre le "bien mais aussi le mal jouer". Pour maitriser l'échec il faut vivre avec les sources des erreurs, les identifier, les comparer en plein jeu donc à pleine vitesse, seule façon de les transformer progressivement en compétences. Ce qui veut dire aussi que l'on vise à former des joueurs capables d'évaluer leur production dans le rapport de force attaque défense si transitoire et si mouvant que propose le rugby. La démarche de formation reste aujourd'hui plus que jamais d'actualité et elle ne concerne pas que les plus jeunes.

Rugbyrama - Pierre Villepreux - 27/11/2007 09:30

Merci Buspard.