XV DE FRANCE :Autopsie d'un fiasco©
lundi 29 novembre 2010 - 09h44 - sports365 -
A défaut de trouver les mots pour expliquer la claque reçue face à l'Australie (16-59), les sélectionneurs ont tenté de souligner certains manques du XV de France. Les raisons de cet échec ne manquent pas.
Une démission collectiveAprès avoir tenu pendant 50 minutes et avoir même mené au score (16-13), l'équipe de France a complètement craqué après les deux premiers essais de Robinson et de Genia. « C'est une vraie défaite collective. On peut même parler de démission, a lancé Sébastien Chabal. Mais je vais m'en tenir là. Il va falloir dire les choses pour voir où l'on veut aller collectivement et comment on veut y aller. Notre force, c'est qu'on est vraiment un groupe. On est tous sur le même bateau, le staff et les joueurs. Il va falloir s'asseoir autour d'une table pour se poser les bonnes questions. » Dimanche matin, Emile Ntamack s'est montré un peu moins dur avec ses hommes. « Les joueurs sont à la peine et quand on parle de démission, ça me dérange. Je n'ai pas vu des mecs qui n'ont pas voulu s'engager physiquement, ils se sont battus. Quand tu prends l'eau, tu coules même si tu écumes. C'est difficile parce qu'on est en retard et on se demande comment rattraper ce retard. Les joueurs te regardent et te demandent comment faire mais toi, tu les regardes à ton tour et tu n'en sais rien... » En encaissant un 46-3 et six essais en deuxième mi-temps, difficile de trouver d'autres explications que la résignation.
Des méthodes de travail contestéesAvant même la rencontre face à l'Australie, certains joueurs se sont étonnés de la préparation trop légère dans le domaine des affrontements. Le manque de mise en situation physique dans les duels a notamment été pointé du doigt. Vu comment les Australiens se sont régalés à chacune de leurs offensives, la question mérite en effet d'être posée. Le staff réfute pour autant la thèse du manque de préparation. « Ce n'est pas simple de faire de l'opposition. Il faut qu'elle soit raisonnée face aux gamins du pole France, a expliqué Lièvremont. Il faut aussi gérer la récupération, travailler la conquête, etc. Cette semaine, Estebanez, Domingo se sont fait mal... C'est compliqué. Et le problème est que, quand on fait l'opposition entre nous, on règle les choses à grands coups d'épaule, à l'énergie. Mais il n'y a pas réellement de faculté à jouer dans les intervalles, au contact, de déplacer le ballon. »
Les lignes arrières à tâtonsCela aura été le fil rouge de cette tournée d'automne. Jamais les lignes arrières n'ont réussi à développer des actions léchées. Face aux Fidji et à l'Argentine, la mêlée et les failles adverses ont suffi pour signer deux succès (34-12 et 15-9) très peu convaincants. Il aura fallu attendre le dernier test-match face à l'Australie pour faire éclater au grand jour ce constat latent : l'équipe de France est à des années lumières des Blacks et des Wallabies (voire de l'Angleterre, l'Irlande et du pays de Galles selon Pierre Villepreux). Julien Malzieu, Vincent Clerc, Clément Poitrenaud, Mathieu Bastareaud ou Maxime Médard (qui a joué contre les Fidji) ont marqué des points par leur absence. La volonté de tester encore et toujours de nouveaux joueurs (Huget, Estebanez) donne une réelle impression de tourner en rond. Une chose est sûre : aucun néophyte ne fera ses débuts en Bleu lors du prochain Tournoi des VI Nations.
L'éternel problème du calendrierL'éternelle rengaine : le calendrier. Alors que les Australiens évoluent ensemble depuis le mois de juin, les Bleus se sont retrouvés pendant trois semaines. Par pudeur, les joueurs ne se sont pas cachés derrière cette excuse même si elle est parfois revenue à demi-mot. « C'est sûr, on peut revenir sur notre calendrier, a lancé Chabal. On peut aussi dire que c'est l'échec du rugby français. Mais ça n'expliquera pas les soixante points encaissés samedi. On ne peut pas se cacher derrière ça. On a baissé la tête. On pourrait se trouver plein d'excuses mais on n'a pas envie de ça. » Le staff parie pour sa part sur les deux mois de vie commune que les Bleus auront avant le Mondial. Même si cela paraît insuffisant au regard du retard accumulé. « D'ici le Mondial, il y aura le Tournoi, rappelle Lièvremont. Nous essaierons de progresser mais l'hémisphère nord représente aujourd'hui la deuxième division du rugby mondial. Nous allons beaucoup miser sur nos deux mois de préparation avant la Coupe du monde en espérant qu'ils seront suffisants. »
Le rugby français pointé du doigtDimanche matin lors du débriefing devant la presse, Marc Lièvremont a été poussé dans ses retranchements. Interrogé sur le mode de fonctionnement de la Fédération française de rugby (FFR), le sélectionneur a refusé de dégoupiller tout en admettant quelques réalités. « Vous comprendrez bien qu'il serait déplacé de dire que nous avons pris 60 points à cause de ça. Quand on gagne, on dit que c'est grâce aux clubs et quand on perd, c'est à cause d'eux. Au-delà de ça, la FFR n'a pas les moyens d'être offensive. » Emile Ntamack a dressé un constat plus amer : « Le problème, c'est que les joueurs ne sont pas exposés au niveau qu'ils rencontrent lors des matchs internationaux. La semaine prochaine, ils seront bons en club, en H Cup mais cela ne les prépare pas au niveau mondial. Il y aura toujours des exploits mais ce qu'on doit atteindre, c'est la régularité et on en est loin. »