Le Petit Bleu
Interview décalée
La culture Déjardins
Né au Vietnam, enfance à Toulon, installé aujourd’hui en Gascogne et demain au Pays Basque, voilà qui résume bien la richesse culturelle de cet agenais d’adoption. Voyage avec l’Oscar du meilleur préparateur physique : Alexis Desjardin
Alexis, on sait que Christian Lanta et Christophe Deylaud viennent régulièrement manger chez toi. Que leur fais-tu de si bon pour qu’ils viennent aussi souvent ?
Je fais des choses assez simples, je n’ai pas vraiment de spécialité. J’aime les cuisines du monde qui ont beaucoup de goût et de senteur, et qu’on n’a pas l’habitude de manger. Ma mère m’a laissé beaucoup de recettes vietnamiennes également.
Je crois savoir que tu es amateur de littérature ?
J’aime beaucoup les romans historiques, les biographies, et des auteurs comme Max Gallo. Je m’intéresse beaucoup à la vie des gens.
Ton style de musique ?
Les musiques du monde qui représentent bien la culture de chaque pays, la musique classique, les musiques orchestrales. Et bien sûr les grands chanteurs comme Brel et Brassens. Je connais leur répertoire par cœur !
Un film qui t’a particulièrement marqué ?
« L’homme qui voulut être roi », une adaptation de Rudyard Kipling. J’aime beaucoup notamment la conclusion, avec le drame qui succède au rêve.
Tu passes beaucoup de temps sur internet ?
Oui, je suis très curieux de nature, et internet est une réponse culturelle à beaucoup de choses. Je ne reste jamais dans le doute, et quand je me pose une question, je file sur internet pour trouver une réponse.
Tu as été prof d’EPS, mais on t’aurait bien vu prof de Lettres…
Oh oui, j’aurais beaucoup aimé être prof de littérature ou de langues étrangères…
Tu parles combien de langues ?
Je baragouine beaucoup de langues : Anglais, Espagnol, Vietnamien, pas mal de langues européennes aussi. En fait, j’arrive à me faire comprendre partout dans le monde !
On a l’impression que tu as été façonné par plusieurs cultures…
Oui, je suis né au Viêt-Nam, j’ai eu une vie familiale équilibrée, et très vite j’ai grandi à Toulon sous le soleil de la Méditerranée, au milieu des couleurs de la Provence. J’aime la culture provençale. J’ai vraiment la double casquette. Là-bas je suis le Français, ici je suis le Chinois !
Avec un parcours sportif assez riche…
Oui, j’ai été préparateur physique pour le Montpellier Hérault Football Club, puis plusieurs clubs de rugby : Tulle, Brive, Nice, Toulon, Béziers, Bayonne et Agen. J’ai été aussi entraîneur pour les Athlètes vietnamiens aux derniers Jeux Olympiques de Beyjing.
Le Viet-Nam, ça évoque quoi pour toi ?
Authenticité, beauté des paysages, hospitalité, gentillesse, et générosité.
Ton meilleur souvenir de rugby ?
Le prochain match ! (rires)
Et ton plus mauvais souvenir ?
Franchement, je n’en ai pas. Y a des descentes et des échecs cruels, mais on rebondit vite derrière. Quand on a la chance de faire ce métier, il ne faut garder que le positif.
Tu as des enfants ?
Trois grands enfants qui ont baigné dans le sport : deux ont été pro de rugby à Toulon et Béziers, et l’autre a fait de l’athlétisme.
On te confond parfois avec Jean Dujardin ?
Je n’ai jamais aimé qu’on confonde mon nom avec Dujardin, mais peut être que j’aurais mieux fait ! Au moins, j’aurais eu un oscar ! (rires)
Qui est le plus râleur ? Christophe ou Christian ?
Christophe. Mais les deux ont une certaine sévérité dans leur façon de faire, ils sont très exigent.
Le joueur qui t’a le plus impressionné sur des tests physiques ?
Il y en a beaucoup… sur la force, je dirais Fonua, sur la course Vaka, sur l’endurance Narjissi. Fa’Aoso est aussi très impressionnant dans la mesure où il est très complet. Il a tout : la vitesse, la force, l’adresse et l’endurance. Mais je suis surtout impressionné par la volonté et la capacité des joueurs à travailler.
Propos recueillis par Laurent Gaultier.
Alexis Déjardins fait figure de druide agenais dans ce camp retranché d’Aginnum qui lutte encore et toujours contre les gros budgets du top14. Tel Panoramix, il détient le secret de la potion magique pour que les guerriers suavistes attaquent les matchs dans les meilleures conditions possibles, dans cette course au Brennus. Pas le chef gaulois non, le bouclier. D’ailleurs, le prénom Alexis ne vient-il pas du verbe grec alexein qui signifie « protéger, repousser » ? Repousser encore et toujours l’envahisseur… Il s’apparente au sage, qui dispense les bons conseils, l’éducation (physique) et la culture, un brin philosophe. Chez Uderzo et Goscinny, il porte une longue barbe blanche. Chez Lanta et Deylaud, il est juste quelqu’un de taciturne, de timide presque. Mais un travailleur de l’ombre comme on dit, qui n’aime pas se mettre en avant, mais toujours souriant, chaleureux, toujours le bon mot à la bouche. La simple lecture de son visage montre un vécu, des histoires, des voyages, un savant mélange de couleurs du monde. « La tête et les jambes » pourrait-on dire pour caractériser ce gaulois. Ou bien « Mens Sana in corpore sano ». La locution est latine cette fois, mais Alexis ne nous en tiendra pas rigueur !