P.Villepreux: regard sur les demies
L'exercice auquel Pierre Villepreux a accepté de se livrer pour nous n'était pas évident, «car il est impossible de se mettre dans le tête des entraîneurs et de savoir quelle stratégie ils ont l'intention d'employer pour ce type de match». L'ancien co-entraîneur du XV de France (1996-1999), sur la foi de ses observations depuis le début du tournoi, a dressé le profil technique des quatre équipes demi-finalistes, elles dont il se dit que leur destin se jouera sur la solidité de leurs avants, ce week-end. «Les deux équipes les plus complètes, celles qui paraissaient pouvoir développer le rugby le plus intéressant sont la Nouvelle-Zélande et l'Australie, or elles ont été éliminées», constate Villepreux avant d'entamer son exposé.
L'ANGLETERRE : « Je connais très bien Brian Ashton. Je sais quel rugby il veut voir jouer par son équipe. A-t-il les moyens de ce rugby total ? Il a des joueurs capables de gagner des matches, mais peut-être pas d'obéir à cette école. On connaît bien les Anglais, qui se sont retrouvés sur un rugby plus rigoureux, fait de conservation et d'avancée des avants. Ce qu'elle a montré en début et en fin de match contre l'Australie n'était pas désagréable, ça jouait. Je ne considère pas que cette équipe se soit vraiment métamorphosée depuis le début de la préparation. Elle a de bons joueurs. Il est clair que s'ils se mettent à jouer sur le même tempo, avec quelques repères, ça peut faire une équipe redoutable.»
LA FRANCE : « On sait tous ce que cette équipe est capable de produire de bon et de moins bon. La France a une capacité à sortir un rugby que personne ne serait capable de créer collectivement, un jeu à essais, qui avance. Je ne parle pas de passe à dix, mais de rugby. Si elle est capable d'avoir une certaine permanence dans ce type de jeu, je veux dire, si elle est capable de tenter vingt actions dans le match, et pas trois, elle sera imbattable. Il semble, vu la composition d'équipe, que la stratégie sera différente. On s'oriente vers un jeu qui prend son temps, qui occupe le terrain. Cette autre forme de jeu, fait d'attentisme et d'opportunisme, peut aussi permettre d'être champion du monde.»
L'ARGENTINE : « Je ne vois pas l'Argentine changer de style pour un match si important. Elle a trouvé un jeu conforme à ses valeurs, qui l'a amenée sur une dynamique de victoires. Les Argentins jouent bien devant, au pied et ils marquent des essais de magiciens, il faut bien le dire. C'est un jeu atypique. Et soyez certains qu'ils ne se poseront aucune question. Ils jouent sans complexe.»
L'AFRIQUE DU SUD : « C'est une équipe brillante dans tous les domaines. En quart de finale, elle a subi un jeu fidjien pétillant, elle n'avait plus de réponse défensivement. Il a fallu retrouver une certaine motivation pour enfoncer le clou. Mais c'est fondamentalement l'équipe la plus complète avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande, celle qui paraît le mieux armée pour développer un rugby intéressant. Je ne sais pas sous quel angle l'Afrique du Sud va aborder ce type de match. Mais elle sait qu'elle est capable d'avoir un jeu tout-terrain.»
Recueilli par Cédric ROUQUETTE
L'Equipe